Densifier la ville : comprendre pour convaincre !
Pour répondre aux besoins de logements sans artificialiser les sols, il n’y a pas d’alternative à la densification. Or si la France construit de l’ordre de 400 000 logements par an, elle ne construit pas dense (100 habitants/km2). Hors métropoles, la disponibilité du foncier et la relative modicité de son coût sont, avec la modestie du coût de l’énergie, des avantages compétitifs indéniables de notre territoire national. Cette relative désinvolture à l’égard du foncier, qui explique pour partie l’étalement urbain, appartient à une époque désormais révolue : la construction tend à se concentrer dans les métropoles, et ce mouvement parait inéluctable. Or c’est là que le foncier est le plus cher et le plus complexe à travailler ; la prise de conscience environnementale suscite une double condamnation de la construction extensive : celles de l’artificialisation des sols et de l’impact carbone.
Nous entrons donc dans une nouvelle ère, qui met encore plus en avant l’idée de densité, pour limiter l’artificialisation, contenir le besoin d’investissements publics et réduire le prix des logements, avec naturellement des nuances en fonction des territoires et des formes d’habitat qui les composent.
Dans ce contexte, construire demain dans les métropoles, ce sera probablement construire des logements plus petits, mais avec plus d’espaces partagés ; sur des friches urbaines ; en recomposition du tissu urbain existant ; plus en hauteur, voire en surélévation.
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Pour une densité désirable
Il n’y a pas d’antinomie entre la densité et la qualité de vie. Au contraire, c’est dans la ville dense que la collectivité pourra produire au meilleur coût les services urbains dont les habitants ont besoin ; c’est par la ville dense qu’on pourra mieux préserver les espaces naturels ; c’est pour la ville dense que les architectes et les urbanistes inventeront de nouvelles combinaisons de matériaux, de conceptions et de solutions pour répondre aux attentes des usagers. Le confort ne passe pas nécessairement par de grands logements, ni la qualité de vie par de grands jardins privatifs difficiles à entretenir, ni l’intimité par des obstacles physiques à l’échange et au partage. La ville de demain reste un domaine propice à l’imaginaire et à l’intelligence humaine, où tous les possibles restent ouverts.
L’immobilier, comme tous les secteurs économiques, est rattrapé par la vague d’innovation et de disruption. Les professionnels du secteur utilisent désormais les données et les nouvelles technologies pour résoudre les problèmes complexes posés par la vie en société. C’est le versant positif de la smart city : mieux comprendre les comportements humains pour envisager des réponses nouvelles aux attentes fondamentales des habitants, qui au fond changent assez peu quant à elles : un habitat confortable, sain, sobre, intime, dans une ville équipée, connectée, sûre et mixte, au service d’une société apaisée, ouverte et responsable.
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ZAN : faut-il, condamner les zones pavillonnaires et la maison individuelle au nom de la maîtrise de l’étalement urbain ?
Entre le pavillonnaire en diffus à grande échelle que nous avons connu, et son discrédit complet au nom du verdissement, il existe des mesures intermédiaires qui méritent d’être creusées. En premier lieu, densifier le tissu pavillonnaire neuf pour réduire son impact environnemental, sans condamner sa production par principe. Plus généralement, on peut néanmoins considérer que c’est un modèle qui a vécu. Ce qui va le rendre obsolète, c’est moins le zéro artificialisation nette (ZAN) que le vieillissement de la population : il sera difficile de vivre dans une maison de 120 m2 avec 1000 m2 de jardin pour un couple de septuagénaires, qui prendra sa voiture pour acheter son pain et faire 50 km pour trouver un rhumatologue.
"C’est une autre ville qui se dessine ainsi, dans laquelle nos repères vont changer. Nous considérons la construction en hauteur avec le souvenir d’opérations d’urbanisme datées. Or, instruits par l’expérience, nous savons aujourd’hui produire de véritables villages verticaux, qui offrent à leurs occupants une diversité inédite de fonctions et de services, une distribution des espaces davantage tournée vers le partage et la communauté, et du verdissement au sein même du bâti. Plus important encore, nous pensons le bâti d’aujourd’hui dans une logique d’économie circulaire, qui permettra non seulement de l’adapter à l’évolution des besoins, mais aussi de préparer sa déconstruction." Alexandra François-Cuxac, Présidente de la FPI France