24 octobre 2019

Construction

L’une des entreprises intervenant sur le chantier est en cours de liquidation. Que dois-je faire ?

Tout d’abord, il convient de distinguer selon que les travaux confiés à l’entreprise concernée ont donné lieu ou non à une réception.

Si l’entreprise est défaillante avant réception, dans ce cas, le modèle FPI de contrat de marché de travaux prévoit (art. 44.1) l’établissement d’un constat d’état des travaux, pas d’un PV de réception. La jurisprudence admet, de manière constante, la possibilité de procéder à une réception partielle par lots (Civ. 3e, 11 oct. 2006, N°05-13846 ; 16 nov. 2010, N°10-10828 ; 21 juin 2011, N°10-20216 ; 15 oct. 2015, N°14-17857). Cependant, le fait de procéder à une réception dans de telles circonstances complique la gestion des sinistres pour le promoteur, maître d’ouvrage (MO), tenu de la garantie décennale d’UN ouvrage. En cas de réceptions partielles, il y aura autant de délais de garanties décennales que de lots … Pour ces motifs, le modèle FPI de marché de travaux pose le principe d’une réception unique de l’ouvrage (art 24.1).

Ensuite, si l’entreprise fait l’objet d’une procédure de redressement ou de mise en liquidation, il n’est pas possible de résilier le marché sans avoir préalablement mis en demeure l’administrateur judiciaire de se prononcer sur la continuation du contrat (art. L. 622-13 du Code de commerce en cas de redressement ;  art. L. 641-11-1 du même Code en cas de liquidation). Ces dispositions du Code de commerce étant d’ordre public, toute clause y contrevenant est réputée non écrite. A titre d’illustration, le modèle FPI de marché de travaux prévoit que « Le marché de l’entreprise placée sous le régime du redressement ou de la liquidation judiciaire est résilié de plein droit, dans l’hypothèse où, après l’expiration du délai mentionné par la mise en demeure, en application des dispositions législatives et réglementaires applicables, les organes de représentation de l’entreprise n’ont pas notifié, au maître de l’ouvrage, leur décision de poursuivre l’exécution du marché » (art. 43.3).

La FPI met à votre disposition un modèle de lettre, qui reprend le délai d’1 mois dans lequel l’administrateur judiciaire peut être mis en demeure de se prononcer.

Dans l’hypothèse où l’administrateur judiciaire fait part de son intention de ne pas donner suite au marché, le contrat peut être résilié. Le promoteur peut recourir à une tierce entreprise pour achever les travaux et le cas échéant, réparer les désordres apparus sur les travaux réalisés.

Avant réception, le MO ne peut pas mobiliser la retenue de garantie. Le cas échéant, il pourra solliciter la mise en œuvre d’une éventuelle garantie de bonne fin de travaux si elle a été prévue dans le marché conclu avec l’entreprise défaillante.

A défaut, le cas échéant, le MO pourra faire valoir, comme le prévoit par exemple l’article 44.3 du modèle FPI de marché de travaux, auprès de l’entreprise défaillante et de l’administrateur judiciaire, une compensation du surcout lié à la substitution d’entreprise.

Si les travaux ont été réceptionnés et que des désordres sont apparus, le MO peut mettre en demeure l’entreprise de réparer les désordres au titre de la garantie de parfait achèvement (GPA). En l’absence de réponse ou d’une réponse négative de l’entreprise, le MO peut recourir à une tierce entreprise pour remédier aux désordres aux frais et risques de l’entreprise défaillante.

Les travaux étant réceptionnés, le MO peut mobiliser la retenue de garantie (RG).

A ce propos, s’il n’y a pas de doute quant à la possibilité pour le MO d’actionner la RG pour remédier à des travaux ayant fait l’objet de réserves lors de la réception (art. 1er de la Loi de 1971 relative à la retenue de garantie), aujourd’hui, à notre connaissance, la jurisprudence n’a pas tranché le cas des réserves apparues dans l’année de parfait achèvement.

L’article 2 de la Loi de 1971 énonce que « A l'expiration du délai d'une année à compter de la date de réception, faite avec ou sans réserve, des travaux visés à l'article précédent, la caution est libérée ou les sommes consignées sont versées à l'entrepreneur, même en l'absence de mainlevée, si le maître de l'ouvrage n'a pas notifié à la caution ou au consignataire, par lettre recommandée, son opposition motivée par l'inexécution des obligations de l'entrepreneur. L'opposition abusive entraîne la condamnation de l'opposant à des dommages-intérêts. »

Dans ce contexte, le MO peut motiver son opposition à la libération de la retenue de garantie pour des désordres apparaissant dans l’année de la GPA suivant la réception.

La FPI met à votre disposition un modèle de demande de versement de la retenue de garantie, à adapter selon que les travaux ont fait ou non l’objet de réserves lors de la réception.