22 mars 2019

Nationale

Urbanisme

Régularisation en cours d’instance d’un permis contesté : le Conseil d’Etat donne le mode d’emploi post-ELAN

Pour mémoire, la Loi ELAN (art. 80) a créé l’article L600-5-2 du code de l’urbanisme, reprenant la jurisprudence administrative, selon lequel lorsqu'une décision modificative (PCM) ou une mesure de régularisation intervient au cours d'une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire initialement et que cette décision a été communiquée aux parties à cette instance, la légalité de cet acte ne peut être contestée par les parties que dans le cadre de cette même instance.

Le Conseil d’Etat a jugé que « En l'absence de disposition expresse y faisant obstacle, ces dispositions, qui conduisent à donner compétence au juge d'appel pour statuer sur une décision modificative ou une mesure de régularisation si celle-ci est communiquée au cours de l'instance relative à l'autorisation délivrée initialement, sont applicables aux instances en cours à la date de leur entrée en vigueur [01.01.2019] » (CE, 15 fév. 2019, N°401384 : Lien )

Par ailleurs, dans cette décision, la Haute juridiction précise les conditions dans lesquelles les parties à l’instance peuvent contester la décision du juge administratif de recourir à l’annulation conditionnelle d’un permis (art. L600-5 du CU – sursis à statuer du juge administratif).

Il ressort de cette décision que lorsqu’une telle décision a été prise par le TA, d’un côté, le requérant est recevable à faire appel du jugement parce qu’en écartant certains de ses moyens et en faisant usage de ces dispositions, le TA a rejeté sa demande d'annulation totale du permis ; de l’autre côté, le titulaire et l’auteur du permis sont recevables à contester le jugement parce qu'en retenant l'existence d'un ou plusieurs vices entachant la légalité du permis attaqué, il n'a pas complètement rejeté la demande du requérant.

Lorsque le juge d'appel est saisi dans ces conditions d'un appel contre le jugement du TA et qu'un PCM a été délivré aux fins de régulariser les vices du permis relevés par ce jugement, comme le prévoit l'article L. 600-5-2 précité du code de l'urbanisme, le bénéficiaire ou l'auteur de cette mesure de régularisation doit la lui communiquer sans délai.

Les parties de première instance comme les tiers ne peuvent contester cette mesure que devant lui tant que l'instance d'appel est en cours (art. R. 345-1 du code de justice administrative). Par conséquent, si un recours a été formé contre cette mesure de régularisation devant le TA, ce dernier la transmet à la CAA saisie de l'appel contre le permis initial. 

Le juge d'appel doit se prononcer dans un premier temps sur la légalité du permis initial tel qu'attaqué devant le TA :

-s'il estime qu'aucun des moyens dirigés contre ce permis, soulevés en première instance ou directement devant lui, n'est fondé, il doit annuler le jugement, rejeter la demande d'annulation dirigée contre le permis et, s'il est saisi de conclusions en ce sens, statuer également sur la légalité de la mesure de régularisation ;

-si au contraire, il estime fondés un ou plusieurs des moyens dirigés contre le permis initial mais que les vices affectant ce permis ne sont pas régularisables, il doit annuler le jugement en tant qu'il ne prononce qu'une annulation partielle du permis et annuler ce permis dans son ensemble, alors même qu'une mesure de régularisation est intervenue postérieurement au jugement de première instance, cette dernière ne pouvant alors, eu égard aux vices affectant le permis initial, avoir pour effet de le régulariser. Il doit par suite également annuler cette mesure de régularisation par voie de conséquence

Enfin, lorsque le juge d'appel estime que le permis initialement attaqué est affecté d'un ou plusieurs vices régularisables, il statue ensuite sur la légalité de ce permis en prenant en compte les mesures prises le cas échéant en vue de régulariser ces vices, en se prononçant sur leur légalité si elle est contestée. Au terme de cet examen :

-s'il estime que le permis ainsi modifié est régularisé, le juge rejette les conclusions dirigées contre la mesure de régularisation.

-s'il constate que le permis ainsi modifié est toujours affecté d'un vice, il peut faire application des mesures d’annulation partielle (art.L600-5) ou conditionnelle (art. L600-5-1).