07 novembre 2019

Nationale

Urbanisme

Le dossier de demande de PC et la constitution de la future servitude de cour commune : suite

CE, 21.10.2019, N°419647 

Pour mémoire, le code de l’urbanisme permet d’échapper aux règles de prospect en instituant une servitude de cour commune (art. L471-1 du Code de l’urbanisme). Dans ce cas, l’article R431-32 du code de l’urbanisme prévoit que « lorsque l'édification des constructions est subordonnée (…) à l'institution sur des terrains voisins d'une servitude dite de cours communes, la demande est accompagnée des contrats ou décisions judiciaires relatifs à l'institution de ces servitudes ».

Au visa de cet article, les tribunaux ont tendance à annuler le PC lorsque le dossier de demande ne comporte qu’un projet de convention [1].

Toutefois, en 2017, le Conseil d’Etat avait annulé une décision de la CAA de Bordeaux appliquant cette jurisprudence, considérant que le Code de l’urbanisme n’impose pas que « la servitude ait été établie et soit entrée en vigueur avant que le permis de construire ne soit délivré » [2].

Dans cette affaire les contours de la servitude avaient été définis « de manière précise et circonstanciée ».

Au cas d’espèce, pour justifier qu'une convention de cours communes sera établie lors de l'édification de la construction projetée, la société titulaire du permis contesté a produit « une attestation établie par un notaire selon laquelle il existait une promesse de vente, entre les consorts (…), d'une propriété dont les références au cadastre étaient données, il y avait lieu, dans le cadre de cette promesse de vente, de constituer une convention de cours communes, il était confirmé à ce notaire l'accord des propriétaires du terrain pour constituer cette convention de cours communes, et qu'enfin, cette convention sera réitérée en la forme authentique au plus tard à l'acquisition du terrain par le pétitionnaire ».

Les juges du fond avaient considéré que cette attestation ne permettait pas de justifier de l’institution d’une servitude de cours communes lors de l'édification de la construction projetée, au motif que « ce document ne comporte aucun élément permettant d'identifier les parties qui y sont mentionnées, et n'est corroboré par aucun autre élément, tel que la copie du projet de convention d'institution de la servitude ou la promesse de vente mentionnant expressément que les vendeurs s'engagent à constituer une telle servitude ».

Le Conseil d’Etat censure les juges du fond dès lors que la société titulaire du permis avait produit une attestation établie par un notaire, officier public ministériel, dont les mentions étaient en elles-mêmes suffisantes à établir la constitution d'une convention de cours communes lors de l'édification de la construction projetée, sans qu'elles aient à être corroborées par la production de la promesse de vent ou du projet de convention.

Ce document satisfait aux exigences du code de l’urbanisme qui imposent que le pétitionnaire de la demande de permis de construire fournisse les documents justifiant de ce qu'une telle servitude sera instituée lors de l'édification de la construction projetée.

A noter que dans cette même décision, à propos des conditions de desserte des constructions permettant l’accès des véhicules de lutte contre l’incendie et de secours, la Haute juridiction rappelle que les dispositions des articles L1424-2 à L1424-4 du code général des collectivités territoriales posent le principe que les services publics d'incendie et de secours doivent intervenir sur tout le territoire de la commune, « sans que puisse leur être opposé le caractère privé des voies qu'ils doivent emprunter.

Dès lors, pour apprécier les possibilités d'accès de ces services au terrain d'assiette, il appartient seulement à l'autorité compétente et au juge de s'assurer que les caractéristiques physiques d'une voie d'accès permettent l'intervention de leurs engins, la circonstance que cette voie ne serait pas ouverte à la circulation publique ou grevée d'une servitude de passage étant sans incidence ».

Enfin, le Conseil d’Etat censure les juges du fond car ses derniers ont omis de se prononcer sur la demande d’annulation conditionnelle (sursis à statuer) du permis de construire contesté formulée par le titulaire dudit permis.

 

[1] voir en ce sens : CAA Versailles, 19 mai 2016, N°14VE01628

[2] CE, 16 oct. 2017, N°401706

 

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