Une crise invisible
La FPI, avec l’ensemble des acteurs de l’acte de construire, alerte depuis maintenant plus d’un an sur la crise du logement qui s’installe inexorablement.
Nous l’avons fait pendant la campagne présidentielle, puis lors de la formation du gouvernement en regrettant l’absence d’un ministre du logement de plein exercice, puis tout au long des débats au sein des différents groupes de travail du conseil national de la refondation.
Aujourd’hui, ces alertes commencent à être reprises en dehors de notre écosystème. Chaque semaine, ou presque, des éditorialistes et des décideurs prennent la plume pour s’inquiéter de la situation actuelle.
Très récemment, Nicolas Baverez dans l’hebdomadaire Le Point (« le krach programmé du logement »), Philippe Manière dans Le Figaro (« Au nom de la planète, l’Union européenne risque de priver de toit les plus modestes ») ou encore de Véronique Bédague dans Le Journal du Dimanche (« Le logement subit un choc d’une violence folle ») se sont exprimés.
Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef, avec lequel j’échange régulièrement, est intervenu dimanche dernier sur RTL puis mercredi sur BFMTV et RMC pour évoquer la « catastrophe » qui se profile si rien n'est fait dans le domaine du logement. Il l’avait déjà fait auparavant sur BFM le 31 mars dernier. Je tiens, par la présente, à le remercier très chaleureusement.
Ces alertes n’ont pas eu d’effet sur le président de la République : le logement n’a pas été évoqué lors de sa dernière allocution télévisée.
Une session de rattrapage a heureusement eu lieu mercredi à l’issue du conseil des Ministres. Dans la présentation de la feuille de route du Gouvernement pour les 100 prochains jours, la Première ministre a évoqué trois pistes de solutions pour améliorer l’accès au logement de tous les Français : mobiliser la Caisse des dépôts, améliorer l’accès au crédit des ménages et donner de la visibilité sur l’évolution du PTZ.
Une prise de conscience de la gravité de situation a enfin eu lieu au plus haut niveau de l’Etat et il convient de la saluer. Les premières pistes mobilisent pour l’essentiel d’autres acteurs que l’Etat (la Caisse des dépôts et les banques).
Pour expliquer ce décalage, une métaphore me semble nécessaire. Plongeons une grenouille dans une casserole remplie d’eau froide. On chauffe l’eau de la casserole, et la température monte petit à petit. La grenouille s’habitue et finit ébouillantée. Si elle avait été plongée dès le départ dans de l’eau bouillante, elle aurait réagi.
Il en est de même de cette crise du logement qui est une crise invisible, un poison lent.
Nos concitoyens se sont habitués petit à petit à la hausse constante des prix des logements. Cette dépense contrainte, intériorisée et considérée comme incontournable, ne pousse pas à la révolte comme cela a pu être le cas pour quelques dizaines de centimes de plus sur le prix de l’essence.
Pire, les Français s’adaptent progressivement à cette crise : les ménages les plus modestes vivent dans des logements toujours plus vétustes ou toujours plus petits. Les jeunes adultes décohabitent de plus en plus tard.
Mais tout cela ne se voit pas, ne s’entend pas. La crise est invisible, la détresse est silencieuse.
Le 9 mai 2023 (restitution des travaux du Conseil national de la refondation dédié au logement), le gouvernement est attendu sur des décisions concrètes, des mesures puissantes et immédiates, pour que la crise du logement ne soit plus subie comme une fatalité. Il faudra OSER !
Qu’est ce que je serais heureux de pouvoir le remercier le 10 mai matin ….
Pascal Boulanger
Président de la FPI France