Nationale

Editorial du Président

Un prêté pour un rendu

La complexité croissante des enjeux, de la réglementation, de la fiscalité, des injonctions des pouvoirs publics et, notamment, de celles des maires qui s’expriment au travers de chartes de plus en plus nombreuses fait que l’interdépendance, voire l’intrication pour reprendre la terminologie des physiciens quantiques, entre les acteurs du logement est de plus en plus forte.

Les relations étroites qui se sont nouées au fil des années entre la promotion immobilière et les bailleurs sociaux en est la parfaite illustration.

Ce n’est pas faire offense au secteur du logement social en affirmant que, sans l’intervention des promoteurs immobiliers, les bailleurs sociaux seraient dans l’incapacité d’atteindre leurs objectifs de production, ou alors à un coût qui serait susceptible de remettre en cause le modèle économique des opérations.

L’obligation faite aux promoteurs, dans le cadre de conventions ou de chartes, de ne pas dépasser des prix plafonds de vente en VEFA aux organismes HLM, a eu pour conséquence de renchérir les prix de vente des logements neufs collectifs aux particuliers acquéreurs et investisseurs.

Les bailleurs sociaux soumis, comme la promotion immobilière, à une hausse régulière du coût des opérations du fait d’une réglementation toujours plus exigeante et à une raréfaction du foncier due à la baisse des permis de construire, n’ont réussi à accroître significativement leur parc qu’en reportant une partie des surcoûts sur le prix des logements privés. Dans le cadre de ce transfert de charges, le logement libre a largement subventionné le logement social.

Aujourd’hui, avec la crise de la demande et la chute drastique des ventes, les rôles s’inversent.

Action Logement, via ses nombreuses filiales, et CDC Habitat ont mis en œuvre un plan de soutien visant à racheter 47 000 logements en VEFA aux promoteurs immobiliers afin d’éviter l’abandon de nombreuses opérations, faute d’acquéreurs en nombre suffisant. Cette intervention, voulue par le gouvernement, est la bienvenue. Moins d’opérations, c’est encore moins de logements pour les Français, alors que la pénurie produit déjà des effets dramatiques : étudiants qui ne trouvent plus à se loger, travailleurs saisonniers (ou non) qui ne peuvent pas se loger à proximité de leur lieu de travail, hausse des impayés de loyer, etc.

En période de crise ou par temps calme, cette interdépendance n’est pas saine. Elle est la conséquence de l’incapacité française à choisir un modèle : économie administrée ou économie libérale.

C’est le cas dans de nombreux domaines : enseignement (écoles publiques et écoles privés) ; recherche ; énergie (renationalisation d’EDF), radios et télévisions privées et publiques, ces dernières étant à la fois financées par l’Etat et par les recettes publicitaires, etc.

En tout état de cause, dans le domaine du logement, il faudra, lorsque la tempête que nous subissons tous se sera calmée, assainir nos relations avec le monde HLM. Ce système de « béquilles réciproques » n’est plus tenable.

Revoir le modèle de financement du logement, tel qu’envisagé par Bercy, passe aussi par cet exercice de vérité.

 

Pascal Boulanger, Président FPI France