Nationale

Editorial du Président

L'état d'urgence digitale

Depuis plusieurs années maintenant, les promoteurs dénoncent des process administratifs fastidieux notamment concernant les dépôts de permis de construire. La crise sanitaire et sa période de confinement ont révélé au grand jour le manque de digitalisation de l’ensemble de la chaîne immobilière.

Aussi, à quelques rares exceptions près, aucune demande de permis n’a pu être déposée depuis un mois et demi et aucune instruction n’a été réalisée : la « chaîne de production » de permis s’est arrêtée net.

Cette paralysie s’explique par le fait que les processus PC restent trop « papier ». Deux raisons à cette résistance :

  • le papier est seul compatible avec la complexité dont notre système raffole. Un permis est fait de l’addition de réglementations (environnement, sécurité, accessibilité, mixité etc.), souvent durcies localement, au point de devenir impossibles à digitaliser : trop d’acteurs, de flux d’informations, de cas particuliers, d’exceptions, de dérogations
  • le papier nourrit une forme de bureaucratie, qui s’auto-entretient. En effet, derrière les réglementations se cachent des services à consulter, des bureaux d’études à engager, des certificateurs à solliciter etc. et cet écosystème se défend.

La crise du Covid agit comme un révélateur qui nous pousse à penser différemment et à accélérer le chantier de la digitalisation, car la loi Elan ne prévoit la télé-instruction des PC que pour 2022 et certaines autorisations demeurent exclues de cette dématérialisation.

Les conditions sont en effet réunies pour franchir un pas décisif :

  • les collectivités locales ont pris la mesure du risque avéré de paralysie de leurs activités
  • leur contrainte financière va être telle (Bercy évoque une perte de recettes pour les collectivités de 14 Mds€ pour 2020-2021) qu’elles vont devoir trouver des sources d’économies. Or le « processus PC », à lui seul, est un énorme gisement de productivité et de progression de la-qualité.
  • L’Etat pourra s’appuyer sur cette prise de conscience locale pour dépasser les blocages politiques qui empêchaient jusqu’à présent d’avancer dans ce domaine, même si on peut souligner l’effort – à parfaire certes – sur la mise en ligne des PLU, via le géoportail de l’urbanisme.

En agissant dès maintenant, la digitalisation produira de la simplification - une simplification après laquelle nous courons depuis des années, sans résultat tangible. L’expérience montre en effet que pour digitaliser un processus métier, il faut faire sa réingénierie, donc reconsidérer chaque tâche à la lumière de son utilité. La digitalisation est l’ennemie des redondances, des circuits longs, des délais superflus, et c’est bien là ce contre quoi nous devons lutter de toutes nos forces.

La tâche est rude, comme le montre l’expérience heurtée de la dématérialisation de la signature des actes chez les notaires. Tous ceux qui s’y sont essayé pendant le confinement ont pu apprécier sa lourdeur, mais elle n’en est encore qu’à ses balbutiements. Elle va monter en puissance :  à nous de l’accompagner et de la compléter dans tous les champs de notre activité.