Nationale

Editorial du Président

Les promoteurs et le patrimoine

Dans une interview récente au Parisien, l’animateur Stéphane Bern a eu cette phrase choc : « j’en ai marre qu’on détruise le patrimoine pour offrir des terrains aux promoteurs, qui n’en ont rien à faire de notre pays et veulent juste faire de l’argent ». En cause, la démolition programmée d’une maison du XIXème siècle, à proximité de Paris, pour faire place à un projet immobilier.

Il y aurait évidemment beaucoup à dire sur cette déclaration à l’emporte-pièce, où l’on retrouve les clichés malheureusement attachés à notre profession, mais ce qui frappe surtout, c’est son injustice. Injustice d’abord, parce que si ce projet immobilier avance, c’est qu’il a été autorisé par un maire sur la base d’un PLU adopté par une collectivité locale, sans objection du ministère de la Culture, qui n’en est pourtant pas avare. On ne construit jamais contre le projet des élus pour leur ville !

Injustice, surtout, parce que c’est méconnaître profondément notre profession que d’opposer promotion et patrimoine. Il suffit en effet de regarder le palmarès de notre concours des pyramides pour trouver nombre de projets qui préservent l’existant en le réinventant. Combien de programmes réalisés dans d’anciens hôpitaux, d’anciennes casernes, d’anciens sites industriels, d’anciennes gares, qui magnifient l’existant et lui redonnent une nouvelle vie ? Combien de halles ou d’ateliers, combien d’entrepôts retrouvent un usage et une place dignes de leur passé dans un quartier réinventé ? Combien de propriétés anciennes, devenues le cœur historique et patrimonial d’un projet ?

En vérité, les promoteurs sont des amoureux de la pierre qui savent déployer toute l’ingéniosité de leurs équipes pour mettre en valeur l’existant, lorsqu’il revêt une valeur historique ou esthétique, et lorsque les élus d’un territoire le souhaitent. Au demeurant, par notre métier, c’est aussi nous qui bâtissons le patrimoine de demain …

Alors non, remplacer ou transformer un bâti ancien, ce n’est pas trahir l’Histoire, c’est d’abord l’écrire. Au XVIIème siècle, la reprise et l’agrandissement d’un petit pavillon de chasse des Yvelines nous a légué … Versailles !

 

Photo : L'Hôtel de Fourcy - Paris (Quartus)