Les ministres passent, Bercy reste !
Mardi soir, la commission des finances de l’Assemblée nationale a auditionné le ministre de l’Économie, Roland Lescure, et la ministre de l’action et des Comptes publics, Amélie de Montchalin. Plusieurs députés, dont le rapporteur général du budget, Philippe Juvin et le rapporteur spécial du budget pour le volet logement, François Jolivet, ont abordé la question du logement. J’ai été frappé, une fois de plus, par les réponses des deux ministres : toujours la même répétition des mêmes éléments de langage, les mêmes raisonnements, les mêmes certitudes.
En résumé : certaines mesures, telles que le soutien à l’investissement locatif, seraient trop coûteuses pour un effet jugé limité. À l’inverse, des solutions dites « plus efficaces et moins chères » comme la mobilisation des logements vacants (dont on a moult fois expliqué qu’ils ne trouvaient pas preneurs car situés dans la diagonale du vide) ou la simplification administrative sont mises en avant.
Ces éléments de langage sont directement dictés par leur administration et ils n’ont rien d’innovant. Ils sont le fruit d’un copier-coller pavlovien de notes produites année après année par une administration enfermée dans ses certitudes. Et ils sont aussi délétères que dangereux.
Heureusement, certaines personnalités politiques ont su s’affranchir de cette pensée unique. Valérie Létard avait cette connaissance du logement, cette capacité à résister à l’argumentaire préconstruit de ses services. Grâce à cela, elle a pu faire avancer la grande cause nationale du logement et elle poursuivra sa mission à l’Assemblée nationale dès qu’elle retrouvera son siège (dans un délai d’un mois). Michel Barnier et François Bayrou aussi, dans leurs déclarations de politique générale, ont porté le sujet du logement et validé, au plus haut niveau, la mise en œuvre d’un statut du bailleur privé.
Aujourd’hui, force est de constater que la Macronie, dans sa version technocratique la plus pure, est de retour. Le nouveau gouvernement, j’espère me tromper, semble avoir remis Bercy aux manettes de la politique du logement. Autrement dit : le politique se tait, l’administration décide.
Je le dis avec gravité : cela suffit.
Face à cette citadelle technocratique qui tue à petit feu notre secteur et je le sais d’autres pans de l’économie productive, je continuerai à me battre. À alerter. À porter des solutions. Nous sommes des locomotives de l’économie française, si nous tombons en panne, ce ne sont pas les wagons sans moteur qui prendront le relais.
Plus Bercy resserrera son étau, plus je parlerai haut et fort. Le statut du bailleur privé est attendu, porté par tous les professionnels, soutenu par une majorité de parlementaires.
Il ne s’agit pas ici de défendre un dispositif pour un dispositif. Il s’agit de défendre une politique cohérente, lisible, ancrée dans la vraie vie, au service d’une cause d’intérêt général : le logement.
Monsieur le Premier ministre, je vous en conjure : gardez votre liberté de penser. Ne vous laissez pas happer par les notes administratives recyclées. Ne laissez pas Bercy verrouiller l’avenir.
La rupture, la vraie, serait de vous émanciper de Bercy.
Je compte sur vous.
Pascal Boulanger, président de la FPI