L'accélérateur et le frein
L’annonce du Pacte pour la relance de la construction durable a marqué un tournant dans le discours du Gouvernement.
Il semble vouloir renouer avec la volonté de construire, ce que confirme, en parallèle, la prolongation du Pinel et du PTZ. Ce sont des signaux positifs pour les promoteurs, qui font écho à l’annonce d’un fonds « friches » et d’un fonds « maires densificateurs ».
Le Gouvernement aurait-il décidé d’appuyer de nouveau sur l’accélérateur ?
Pas tout à fait, car au même moment, le Gouvernement annonce aussi :
- une RE 2020 qui sera inévitablement un facteur de surcoûts : il parle de 3 à 4 % à court terme, un chiffre contesté par les professionnels mais qui, même s’il était exact, serait déjà très substantiel ;
- le « zéro artificialisation nette », dans le projet de loi « convention citoyenne pour le climat » qui, créant de la rareté, sera aussi un facteur de surcoûts.
Tout cela va rendre plus difficile la commercialisation des logements neufs, à plus forte raison au moment où la régulation du crédit immobilier crée aussi de la rareté dans le financement des acquéreurs.
De même, si le Gouvernement reparle de construction, c’est une construction qu’il souhaite très qualitative, à qui on demande de traiter non seulement les problématiques environnementales (changement climatique, biodiversité, protection des ressources et des milieux etc.) mais aussi la solidarité (via la mixité sociale ou l’accessibilité), la santé (via la qualité de l’air intérieur ou l’isolation phonique), le vieillissement, l’accès au numérique, les transports ou les mutations du travail.
Il ne manque guère que l’agriculture pour avoir fait le tour des politiques publiques, mais nous y venons avec la pression croissante en faveur de l’agriculture urbaine sur nos 5èmes façades.
En réalité, le logement neuf se prête trop bien aux excès des politiques publiques à la française, pour deux raisons : il suffit d’écrire une norme pour agir, et le prescripteur n’étant pas le payeur, rien ne vient tempérer son ardeur réformatrice.
Normer le neuf et le contraindre, c’est faire de la politique à bon marché.
C’est cette réflexion qui a guidé la réaction de la FPI sur la RE 2020 : nos logements neufs sont très performants sur le plan énergétique, nous avons toujours besoin d’en construire beaucoup et nous traversons une profonde crise de l’offre, donc pourquoi vouloir franchir rapidement des seuils très élevés de performance – tout cela au moment où le Haut conseil pour le climat explique que des gisements colossaux d’économies d’émissions de GES restent à exploiter dans le parc ancien ?
Nous avons été entendus sur plusieurs points-clés, en particulier par l’étalement sur près de dix ans de la montée en puissance de l’approche « analyse du cycle de vie » (ACV), mais la vigilance reste de mise vis-à-vis du risque de surenchère.
Alors oui, le neuf est de nouveau encouragé, mais c’est un neuf toujours plus contraint.
Or quand on appuie en même temps sur l’accélérateur et sur le frein, on consomme beaucoup plus sans aller loin !