Du bon et du moins bon
Les rapports des trois groupes de travail du conseil national de la refondation dédié au logement ont été rendus publics ces dernières semaines.
Certaines libertés ont été prises. Ainsi le groupe de travail initialement intitulé « réconcilier les Français avec l’acte de construire » a été renommé par ses rapporteurs en « réconcilier la France avec la production de logements nouveaux ». Le glissement sémantique n’est pas innocent, les rapporteurs considérant, ex nihilo, que « l’offre de logements réside surtout dans ce qui est déjà bâti ».
Dont acte. L’idée de répondre aux besoins en logements de nos concitoyens en remettant sur le marché des logements vacants, souvent situés dans des territoires peu attractifs, a malheureusement la vie dure. La FPI France se bat très fréquemment contre l’erreur qui consiste à confondre cause et conséquence. C’est l’absence de demande qui crée la vacance et non la vacance qui permet de satisfaire la demande.
La forte implication de l’ensemble des acteurs de l’acte de construire, professionnels et associations, a permis l’émergence de très nombreuses propositions. Nous pouvons saluer celles, nombreuses, qui rejoignent les nôtres : revoir la fiscalité foncière, territorialiser les besoins en logements, imposer une densité minimale, lutter contre les recours abusifs, etc.
Deux d’entre elles, aux antipodes l’une de l’autre et ayant chacune un fort impact opérationnel et symbolique, ont plus particulièrement attiré mon attention.
Une des propositions de ce rapport consiste à mettre en œuvre une aide de 10 000 € par logement (ce qui correspond à 25% de la TVA sur le neuf environ pour un logement vendu 200 000 € HT) afin d’encourager et accompagner les maires engagés.
Cette mesure s’inspire de l’Appel de Strasbourg (juillet 2022) qui prévoyait le fléchage d’une partie de la TVA immobilière au-delà d’un certain seuil vers les maires bâtisseurs.
Si le principe reste le même, ses modalités de mise en œuvre présentent des risques majeurs.
Il s’agit en effet d’une aide budgétaire, devant faire l’objet d’un vote annuel en loi de finances. Perçue immanquablement par Bercy comme une dépense, sa longévité risque d’être courte et ne pas survivre, si elle est votée, plus d’une année.
Le fléchage de la TVA a en revanche l’avantage essentiel d’échapper à cette contrainte en n’étant pas directement soumis à l’annuité budgétaire. Directement liée à la production de nouveaux logements qui, sans elle, ne sortiraient pas de terre, cette mesure est positive pour le budget de l’État.
Sur la base de l’analyse des besoins complémentaires en logements des 20 premières métropoles françaises, réalisée par l’ESCP Junior Conseil, la FPI France évalue le gain de cette mesure pour l’État à plus de 500 millions d’euros par an, sur la base d’un reversement de 75% de ce surplus de TVA à l’État, les 25% restant (près de 170 millions d’euros) étant versés aux communes bâtisseuses.
C’est une vraie proposition consensuelle, positive. Elle est gagnante pour l’État, gagnante pour les collectivités, gagnante pour l’emploi et l’économie (deux emplois créés par logement nouveau) et gagnante pour la planète (les logements créés sont vertueux sur le plan énergétique et environnemental et sobres en foncier).
Je regrette qu’il n’en soit pas de même pour d’autres mesures avancées dans ce rapport à l’instar de celle qui consisterait à encadrer les prix du foncier.
Le fléchage de la TVA, que nous portons depuis des mois, est l’exemple même d’un vrai partenariat public-privé positif (la TVA servant à financer des équipements publics) quand la proposition d’encadrer les prix du foncier vise à se substituer au marché en le régulant de manière contraignante et stigmatisante (ce qui de plus ne fonctionnera pas).
Après l’encadrement des loyers, l’encadrement des prix du foncier. Le logement, faute de faire l’objet d’une véritable approche systémique, sera-t-il bientôt nationalisé bloc après bloc ?