Des silences assourdissants, des paroles choquantes
Pierre Rochette, géologue et physicien, a décidé, tout dernièrement, de restituer sa médaille d’argent du CNRS qui distingue l’originalité, la qualité et l’importance de ses travaux, en signe de protestation contre le « fardeau bureaucratique » qui l’empêche tout simplement de faire son métier.
Et de s’interroger : les chercheurs doivent-ils « se coller les mains à leurs appareils de mesure ? Jeter de la peinture orange sur leur patrimoine ? Retourner les panneaux d’entrée de leurs campus ? ».
Nous en sommes au même point, freinés voire bloqués par une réglementation trop complexe.
Une lueur d’espoir ?
Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, a affiché sa volonté, qui devrait se concrétiser dans le cadre de la future loi Pacte 2, de mettre en œuvre des mesures DRASTIQUES de simplification pour les entreprises visant notamment à réduire les délais qui pèsent sur celles-ci. A titre d’exemple, il cite les délais de traitement des contentieux d’urbanisme.
Nonobstant le fait que la question de la simplification revient régulièrement dans le débat politique et que tous les gouvernements affichent, sans succès jusqu’à présent, leur volonté de mettre fin à la complexité réglementaire qui bride l’action du monde économique, nous allons, une fois encore, féliciter le gouvernement pour cette initiative et une nouvelle et, une énième fois, proposer des mesures de simplification pour rendre l’acte de construire plus fluide et plus rapide. Je précise qu’elles sont toutes connues et disponibles, proposées à chacune des multiples commissions qui se sont réunies depuis plus de 3 ans.
Mais soyons lucides : le mal est tellement profond qu’il est pratiquement indéracinable.
La complexité vient souvent de l’incapacité du gouvernement et surtout de son administration à suivre des objectifs clairs et à faire confiance aux acteurs économiques.
Un exemple parmi d’autres. Le gouvernement a introduit dans le projet de loi de finances pour 2024 une disposition prévoyant des abattements sur les plus-values immobilières, notamment en cas de réalisation de logements locatifs intermédiaires. Las, l’administration a considéré que cette mesure ne pouvait se suffire à elle-même et qu’il fallait l’assortir de dispositions complémentaires : imposer des contraintes de densité (oui à la densité concertée, non à des objectifs que nous savons inatteignables dans les PLU), limiter cette mesure sur certains territoires, prévoir des loyers inférieurs à ceux du LLI.
L’accumulation de ces contraintes rend la disposition quasi inopérante.
Pourquoi faire preuve, avec une opiniâtreté qui impose le respect, d’un tel acharnement ?
Écraser et faire disparaître notre profession ?
Le refus de la Première ministre de recevoir en urgence les dix présidents de l’Alliance semble le confirmer.
L’interview aussi approximative que violente de Patrice Vergriete dans Le Point, comparant le secteur de l’immobilier à un drogué qu’il faudrait sevrer, nous a choqués mes confrères et moi-même, mais a également heurté des parlementaires qui s’en sont publiquement émus.
Je me pose la même question que Pierre Rochette : que faut-il faire pour que l’acharnement réglementaire cesse ?
Que faut-il faire, par ailleurs, pour que le silence condescendant de l’exécutif cesse et que nous soyons au moins entendus à défaut d’être défendus ?
Nous avons des idées et des réponses sur le fond et nous sommes prêts à en débattre.
En revanche, toutes les bonnes idées pour être entendus au plus haut sommet de l’État sont les bienvenues… même les plus disruptives !
Pascal Boulanger
Président de la FPI France