Nationale

Editorial du Président

Tous perdants

« Que le meilleur gagne ! ».

Cette phrase, définitive, prononcée il y a maintenant près de deux ans par un conseiller de Matignon, avait conclu les échanges entre la FPI et le cabinet du Premier ministre Jean Castex portant sur le maintien, que nous estimions et estimons toujours nécessaire, de deux dispositifs de logements intermédiaires : le Pinel et le LLI.

Malheureusement, nous constatons, deux ans plus tard, qu’il n’y a que des perdants.

Jean-Baptiste Blanc, Sénateur du Vaucluse, l’analyse très bien dans son rapport spécial sur la mission « Cohésion des territoires », examiné dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024 : « Les économistes réunis par la commission le 18 octobre dernier nous ont mis en garde : le logement est le grand absent de la politique du Gouvernement. Or, le manque de logements a un impact sur l’échec scolaire et l’insertion professionnelle ; il rend les recrutements plus difficiles et constitue un handicap majeur pour l’économie. Le Gouvernement reste en retrait sur cette question du logement, sans doute volontairement, voire idéologiquement. »

Comme la quasi-totalité des parlementaires que je rencontre (plusieurs par semaine), nous déplorons tous ce retrait du gouvernement sur la question du logement, qui est inquiétant parce qu’il semble parfaitement assumé. Ils sont malheureusement dans l’incapacité de répondre aux sollicitations de leurs administrés : la recherche d’un logement s’est largement substituée à celle d’un emploi et est devenue la première et principale demande.

Très récemment, avec les présidents des 9 autres fédérations ou unions constitutives de l’Alliance pour le logement, j’ai sollicité un rendez-vous auprès de la Première ministre pour évoquer avec elle la grave crise du logement et les mesures d’urgence à mettre en œuvre.

Une réunion de préparation de près d’une heure et demie s’est tenue cette semaine entre certains délégués généraux des membres de l’Alliance et la direction du cabinet de la Première ministre.

Réponse brutale de son cabinet à ceux-ci à la toute fin de ces échanges : la Première ministre ne nous rencontrera qu’en janvier ou février prochains, avec l’annonce de mesures structurelles alors que nous voulions une réunion imminente pour les mesures de crise.

En ignorant délibérément la situation dramatique actuelle et en l’enjambant pour se projeter dans des réformes structurelles, la Première ministre joue à un jeu dangereux avec les nerfs de nos concitoyens, chaque jour davantage confrontés à la difficulté de se loger, accentuant un peu plus leur détresse.

Détresse des étudiants : l’Union Etudiante estime qu’un sur deux est mal logé et que 87 000 d’entre eux sont sans domicile !

Détresse des entreprises, qui peinent à recruter des salariés faute pour eux de pouvoir se loger dans le périmètre de leur emploi.

Détresse des finances publiques : la chute drastique des ventes de logements neufs va priver l’Etat et les collectivités locales de plus de 4 milliards de recettes de TVA dès 2024 et de droits de mutation à titre onéreux.

Détresse du secteur : faute de soutien, l’appareil de production et son savoir-faire va, pour partie, disparaître sans parler des centaines de milliers d’emplois menacés.

Ces détresses, si elles ne sont pas entendues, pourraient se transformer en colère !

Nous serions alors tous perdants.

Madame la Première ministre, si vous ne voulez plus loger les Français, dites-le plus clairement.

Pascal Boulanger, Président de la FPI France